Guerre de Libération : Les Algériens de Coeur et de Conviction

De l'époque numide aux temps modernes.
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AAF 2020
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Re: Guerre de Libération : Les Amis de l'Algérie

Message par AAF 2020 »

JOURNALISTE, ÉCRIVAIN ET AMI DE L'ALGÉRIE : Jean Lacouture nous quitte à 94 ans

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Jean ne sera plus là pour nous éclairer de son intelligence, nous émouvoir par son humanité et nous ravir de ses anecdotes. Adieu, l'ami de l'Algérie!
Le journaliste, biographe des grandes figures du XXIe siècle et ardent avocat de la décolonisation, Jean Lacouture, s'est éteint à l'âge de 94 ans, a annoncé samedi dernier sa famille.
La disparition de cette grande plume de la presse française et chroniqueur passionné, a suscité de très nombreux hommages dans le monde intellectuel et politique.
Journaliste engagé ayant collaboré pendant une vingtaine d'années avec le quotidien Le Monde, Jean Lacouture est décédé chez lui, à Roussillon (Vaucluse en France) «paisiblement et dans la sérénité», a indiqué sa fille, Dominique Miollan-Lacouture, qui a précisé qu'une cérémonie serait organisée en septembre à Paris pour lui rendre hommage.
Témoin privilégié du XXe siècle, dont il a rencontré la plupart des grandes figures, l'originalité du parcours et l'ampleur de son oeuvre ont fait de lui un journaliste, biographe et historien hors du commun. Dès la fin des années quarante, il prend conscience que la décolonisation était inévitable. Il en devient l'ardent avocat.
Journaliste d'abord à Combat, il rejoint la rédaction du Monde dont il devient une signature et couvre la décolonisation avec passion, notamment celle de l'Algérie pour laquelle il a consacré deux livres. Observateur direct des combats de la guerre d'Algérie et des difficiles négociations d'Evian entre le gouvernement français et le gouvernement provisoire de la République algérienne (Gpra), Jean Lacouture retrace dans son livre «Algérie, la guerre est finie» paru en 1985 aux éditions Complexe (Bruxelles) les difficultés, dues à l'écart initial des positions des deux parties et à leurs divisions.
Jean Lacouture édite en 2008 un autre ouvrage qu'il consacre à l'indépendance de l'Algérie et à la fin de l'Empire colonial français. «L'Algérie, algérienne fin d'un empire, naissance d'une nation», préfacé par Jean Daniel, retraçait la lutte pour l'indépendance de l'Algérie et la fin de la France colonialiste.
Journaliste au Monde à l'époque de la guerre de libération, ce biographe de De Gaulle, Mendès France, Mitterrand, Hô Chi Minh ou encore de l'égyptien Djamel Abdel Nasser, offre dans ce livre une chronique historique et un récit journalistique au jour le jour du combat mené par les Algériens pour l'indépendance.
Homme de gauche prônant un «journalisme d'intervention», il ne croit pas à l'objectivité. «Le journaliste agit comme un diplomate: il s'efforce de comprendre et faire comprendre les différents points de vue, tout en ne cachant pas qu'il souhaite telle issue plutôt que telle autre».
En la personne de Jean Lacouture, l'Algérie perd un grand ami et un homme qui a fait honneur aux luttes des peuples contre le colonialisme et la domination étrangère.
Il était «un homme passionné, indépendant et courageux», «qui a écrit l'histoire de France en même temps qu'elle se faisait», a salué le président François Hollande.
«Infatigable militant de la décolonisation, il suivit tous les conflits de la France de l'après-guerre pour Combat, Le Monde, France-Soir et Le Nouvel Observateur. Par son sens du récit, il montra ce que le journalisme peut porter de meilleur au plan littéraire», a souligné le président de la République dans un communiqué. Jean Lacouture «savait aussi reconnaître ses erreurs, preuve de sa grande honnêteté intellectuelle», écrit François Hollande.
Une allusion notamment à la condamnation - tardive - du régime khmer rouge par l'écrivain. «Mais il ne cédait rien sur ses idées, ne renonçait à aucune de ses convictions», juge le président Hollande.
«Il avait une allure de mousquetaire, un profil en lame de couteau, les sourcils fournis et les yeux plissés par un éternel sourire. Bluffant jusqu'aux plus brillants de ses collègues, c'est debout et en un quart d'heure que Jean Lacouture tapait à la machine l'éditorial de politique étrangère du Monde au début des années 1960», se souvient le grand quotidien du soir sur son site Internet.
«Il fait partie des quelques grands qui nous ont donné envie de faire ce métier», a déclaré à l'AFP Jean-Pierre Elkabbach.
Il faisait preuve d'une imposante capacité de travail et de synthèse, accumulant anecdotes et détails inconnus du public. Mais Jean Lacouture ne sera plus là pour nous éclairer de son intelligence, nous émouvoir par son humanité et nous ravir de ses anecdotes. Adieu, l'ami de l'Algérie!
http://www.lexpressiondz.com/actualite/ ... 4-ans.html
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BerrouLana
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RIP :avo:
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algerie
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Re: Guerre de Libération : Les Amis de l'Algérie

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AAF 2020
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Re: Guerre de Libération : Les Amis de l'Algérie

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Boudraâ, née Lucette-Madeleine Dubard : Hommage à une militante hors du commun
Madame Boudraâ n'est plus, elle a rejoint dans l'éternité le maître et le père spirituel de plusieurs générations de médecins. Elle est venue d'Oran pour s'éteindre à Montpellier, elle qui a vécu et adopté Oran comme terre pour toujours. Cette femme de Poitiers, née Lucette-Madeleine Dubard à Châtellerault, discrète et humble devenue Nadia Boudraâ avait unit son destin à un «indigène» de l'époque. Elle l'a accompagné durant sa formation de médecin et a rejoint, l'Algérie combattante, pour s'engager, avec lui, dans le combat pour la liberté et la dignité. Jeune étudiant, issu d'une famille algérienne modeste, épris de liberté et imprégné de l'effervescence du mouvement national, Si Abbas Boudraâ s'inscrit pour des études de médecine, d'abord à Alger. Ne pouvant pas être logé , car de ce temps-là «on ne louait pas à l'Arabe indigène», il quitte l'Algérie pour entamer des études à la faculté de médecine de Poitiers. Pour subvenir à ses besoins, il fait des petits boulots et joue au football. Dans cette ville chargée d'histoire, foulée par les galops des chevaux arabes, qui a donné naissance à la légende de Charles Martel, une version déformée souvent par les historiens, l'Arabe eut la chance et le bonheur de rencontrer la femme de sa vie, qui devint sa compagne, pour toujours, en épousant son idéal et en participant à tous ses combats.

A l'appel de Front de Libération nationale de l'année 1956, Abbas Boudraâ , médecin et interne en chirurgie quitte l'Université française et rejoint les feux du maquis de l'ALN, à la frontière tunisienne , il devient le chirurgien de l'Armée de Libération nationale au service de son pays, Lucette, à ses cîtés, est son soutien indéfectible et sa compagne. Si Abbas assiste aux évènements sanglants de Sakiet Sidi Youssef et soigne les blessés et les mutilés de ce massacre. Tous deux portent en eux les grands rêves d'une Algérie nouvelle, réconciliée et plurielle. Ils la voulaient fidèle à ses traditions ancestrales et à son histoire. Ils la voulaient « la Bahia », celle qu'Ibn Khaldoun a décrite.

Celle qui a hanté le prince andalou échoué dans un naufrage sur le rivage des «Andalouses». Celle des deux lionceaux qui prient aussi bien «Sidi el Houari» et «la Vierge de Santa Cruz» Celle qui a été bercée par la voix de Reinette l'Oranaise avec le regard du cœur sur notre siècle.

Celle d'antan

L'heure de l'Indépendance ayant sonné la fin des hostilités et les évènements de l'OAS arrivant, imposent à Si Abbas de regagner plus tôt que prévu la ville d'Oran, pour soigner ses compatriotes à la clinique «Tambouctou» de Médina Jdida», et au prix de sa vie. C'était une véritable guerre civile qui empêchait la population arabe de se rendre dans les quartiers européens. Lucette, quant à elle, décide de le rejoindre avec ses enfants, en bas âge, Oran, et en bravant tous les dangers.

L'Indépendance arrivant, il devient médecin chef de la chirurgie au Pavillon 10 du CHU d'Oran et premier maire de la ville d'Oran, Lucette est secrétaire de la direction de l'hôpital d'Oran. la Clinique Aït Idir Ali, ancien Pavillon 10 qu'il dirige devient une véritable école de formation pour les médecins et les chirurgiens et un lieu d'humanité pour les malades. Des souvenirs remontent du fin fond de ma mémoire, je me souviens d'un jour où Si Abbas, malmené par les responsables de la Santé de cette période, et n'ayant aucun autre moyen de s'opposer à une mauvaise organisation de notre système de santé entame une grève de la faim, me dit avec colère « je ne suis pas triste à cause d'eux, mais je le suis pour ce beau jeune homme qui a agonisé dans mes bras, à la suite d'un attentat de l'OAS , et qui me répétait à plusieurs reprises «cela ne fait rien Si Abbas que je meure , pourvu que l'Algérie vive » . L'impasse où habite la famille Boudraâ a été baptisés, d'ailleurs au nom de ce jeune martyre, « Maouad »

Ce beau couple métissé a vécu avec espoir, les premiers élans de l'Indépendance et des moments heureux, de voir, l'Algérie avancer dans la bonne direction, mais aussi des misères, des souffrances. Ils ont vu et vécu l'Algérie, déclinant dans des tragédies inattendues à cause des mauvais choix. Ils ont eu des moments de regret, de douleur, de colère, quelquefois des lueurs d'espoir. Ils ont vécu dans la simplicité et l'humilité, fidèles à des convictions et des principes qu'on ne pouvait négocier. Le professeur Boudraâ a été le premier maire et bâtisseur de la ville d'Oran de l'Indépendance, les Oranais se souviennent du maire de leur ville et du responsable, hors du commun, pour son honnêteté et son humanité.

Les étudiants, les chirurgiens également. Bien souvent, on oublie le rôle joué par Nadia, sa femme dans son combat, par sa présence dans les moments difficiles, son réconfort, et son soutien . Les médecins, les étudiants, les résidents et les assistants se souviennent de la gentillesse de son accueil quand ils frappaient à sa porte pour voir le maître. C'était tout aussi vrai pour les citoyens qui venaient le solliciter pour des problèmes sociaux et de santé. Merci pour tout Madame . Tous ceux qui vous connaissent témoignent des bonnes œuvres accomplies. Vous qui êtes venue de l'autre côté de la Méditerranée pour vivre avec nous, les difficultés et les méandres de l'histoire de cette Algérie souffrante, à bout de souffle, mais éternelle. Vous nous avez quittés avec des pensées pour votre terre d'adoption, sereine, l'esprit tranquille et la conscience apaisée. Même morte, votre visage était beau et inondé de lumière, il exprimait le devoir accompli et le bien réalisé sur terre.

De là où vous êtes, dans l'immensité du ciel , vous nous regardez avec votre grand amour, Dieu vous aime, nous le prions pour vous accueillir dans Son Vaste Paradis, nous l'implorons. Reposez, Madame, près de votre mari et votre fils au sein de cette terre que vous avez tant aimée.

A dieu nous appartenons et a lui nous retournons Allah yerhamkoum

* Pr C. Touhami chirurien du chu d'oran et de Sidi Bel-abbes Ancien recteur

http://www.lequotidien-oran.com/index.php?news=5217898

AAF 2020
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Message par AAF 2020 »

La moudjahida Claudine Chaulet n’est plus
La Moudjahida, auteure et professeure de sociologie, Claudine Chaulet, est décédée dans la nuit de jeudi à vendredi à Alger, à l’âge de 84 ans.

L’enterrement aura lieu samedi aux cotés de son mari, le médecin et militant anti-colonialiste, le Moudjahid Pierre Chaulet, décédé il y a trois ans, au cimetière d’El Madania à Alger.

Pierre et Claudine Chaulet, un engagement algérien
Pierre Chaulet, né à Alger en mars 1930 et Claudine Guillot née à Longeau (Haute-Marne) en avril 1931 se rencontrent en décembre 1954 chez André Mandouze, professeur de langue et littérature latines à Alger depuis 1946 et engagé pour l’autonomie de l’Algérie depuis son arrivée à Alger. Pierre, sous la direction de Mandouze, prépare avec d’autres étudiants français et algériens, ses camarades, un numéro de Consciences Maghribines, dont le premier numéro a paru en février 1954, Claudine est une étudiante de Lettres classiques de Mandouze.

Un couple mixte
Pierre et Claudine se fiancent aux vacances de Pâques à Ben Aknoun et se marient le 12 septembre 1955 à la mairie d’Alger et à l’église d’Hussein Dey, sous la présidence du curé Jean Scotto, pied-noir libéral, ami de la famille Chaulet, devenu après l’indépendance algérien et évêque de Constantine. Ce mariage est présenté par Claudine comme un « mariage mixte » entre une Française de France, fille de fonctionnaires laïques et républicains (mère agrégée d’histoire, père officier de gendarmerie) et un Français d’Algérie (3e génération), fils de catholiques sociaux. Cette double origine n’est pas sans marquer leur parcours commun. Pierre est en effet le fils d’Alexandre Chaulet, syndicaliste catholique fondateur et responsable de la CFTC (Confédération française des travailleurs chrétiens) à Alger, et est lui-même formé par le scoutisme catho et étudiant engagé à la JEC (Jeunesse étudiante chrétienne), très sensibilisé aux inégalités sociales et aux discriminations raciales. Claudine, elle, est arrivée avec ses parents, résistants au nazisme, à Oran en 1942 et à Alger en 1946. Après le lycée, elle y fait des études de Lettres classiques, puis en 1953 au Musée de l’Homme à Paris au CFRE (Centre de formation aux recherches ethnologiques) constitué par Leroi-Gourhan, où elle rencontre aussi Louis Massignon, islamologue catholique très proche de la mystique musulmane soufie.

Externe à l’Hôpital Mustapha de 1950 à 1954 puis interne, Pierre engagé à la JEC (Jeunesse étudiante chrétienne) est aussi très proche des SMA (Scouts musulmans algériens), de l’UJDA (Union de la Jeunesse démocratique algérienne) et de l’AEMAN (Association des étudiants musulmans d’Afrique du Nord) : il côtoie ainsi, entre autres, Redha Bestandji, Mahfoud Kaddache, Mohamed Salah Louanchi qui épousera une sœur de Pierre, tous collaborateurs de Mandouze àConsciences Maghribines. L’année 1955-56, année des négociations pour l’autonomie interne puis l’indépendance de la Tunisie et du Maroc, c’est aussi, en Algérie, l’année du rassemblement progressif de toutes les forces patriotiques et nationalistes autour du FLN. Le jeune couple, engagé auprès des responsables du FLN à Alger, rencontre Abane Ramdane, le chef politique à Alger, le 21 septembre 1955. La participation de Pierre, engagé depuis le début des années 1950, et de Claudine à la lutte de libération nationale va se confirmer et s’accentuer, avec des prises de risques. Au moment de la naissance de leur premier enfant en juin 1956, ils participent à Alger dès ce même mois au journal du FLN El Moudjahid installé à Tunis. Pierre est arrêté par la DST à Alger en février 1957, emprisonné et jugé, puis expulsé d’Algérie le 7 mai 1957. Il s’installe provisoirement en France, soutient sa thèse de doctorat à Paris en décembre 1957, puis part le 20 décembre pour Tunis où Claudine se trouve déjà depuis novembre.

De 1957 à 1962 à Tunis

Claudine fait sa première rentrée universitaire en Sciences sociales à Tunis sous la houlette du professeur Berthelot. Pierre, qui s’est spécialisé auprès du professeur Lévi-Valensi à Alger dans les maladies pulmonaires et la tuberculose, travaille au service des tuberculeux à l’hôpital de Tunis et au service de la santé de l’ALN-FLN. Il est aussi engagé par Abane Ramdane auprès de Redha Malek et Ahmed Boumendjel pour El Moudjahid à Tunis. L’assassinat de Abane Ramdane au Maroc par les siens (le colonel Boussouf en serait le responsable) provoque un premier choc chez nos deux jeunes gens qui suivent attentivement les événements en France, en Algérie et dans le monde arabe. Ils font aussi la connaissance de Frantz Fanon qui deviendra un de leurs amis proches. Claudine encadre en 1959 avec Janine Belkhodja le groupe des moudjahidate démobilisées aux frontières et envoyées à Tunis : c’est l’année du plan Challe en Algérie, très efficace contre les maquis de l’ALN.

En 1961-62, ils sont associés à la préparation des contributions pour les négociations, en particulier à la demande de M’Hamed Yazid du GPRA, et à la préparation des accords pour le statut de l’Église catholique en Algérie après l’indépendance, avec le soutien de Mgr Duval qui mandate de son côté l’abbé Scotto à cet effet. C’est ce qui permettra à cette Église de bénéficier d’un statut de « protégée » en Algérie où, aujourd’hui encore, elle dispose de cinq diocèses (Alger, Oran, Constantine, Hippone-Annaba, Laghouat). Ils s’occupent aussi du rapatriement en Algérie des réfugiés algériens de Tunisie à partir de mars 1962. Ils sont à Paris le 1er juillet 1962 et y fêtent l’indépendance de l’Algérie dans un banquet organisé par la Fédération de France du FLN (la 7e wilaya) qui a soutenu financièrement l’effort de guerre de l’ALN et du FLN. « Nous avons quitté la Tunisie sans regrets, exaltés par ce qui nous attendait à Alger et vivement pris par l’idée du retour », écrit Claudine.

Dans l’Algérie indépendante 1962-1994 : leur engagement d’algériens

Ce sont « trente-deux années d’heures exaltantes, en participant activement – douloureusement parfois – à la construction d’une Algérie nouvelle », écrit Pierre, qui a pris tout de suite la nationalité algérienne. Il travaille en médecine à l’hôpital Mustapha où il donne des cours de pathologie respiratoire et de thérapeutique avec son collègue Djilali Larbaoui dès janvier 1964, crée avec celui-ci en mai 1965 le « Comité algérien de lutte contre la tuberculose » (association bénévole), qui devient membre de l’UICT (Union internationale contre la tuberculose) et publie avec ses collègues les premièresRecommandations sur le diagnostic et le traitement de la tuberculose pulmonaire en avril 1966. Il participe ensuite à des congrès internationaux à New York (1969), à Moscou (1971) et en 1972 à la 4e Conférence régionale de la tuberculose à Ouagadougou, qui constitue pour lui son premier contact avec les pays d’Afrique Noire. Il est élu en 1975 délégué à l’APC (Assemblée populaire communale) d’Alger (quartier d’Hydra), reconnaissance de son engagement pour son pays natal.

Claudine choisit le Mara (Ministère de l’Agriculture et de la Réforme agraire) et participe aux projets de nationalisation des terres appartenant à des étrangers et aux « Comités de gestion » (modèle d’autogestion yougoslave) des biens agricoles vacants et des grands domaines : c’est pour elle une première déception avec les difficultés rencontrées dans cette réforme agraire improvisée et peu efficace ; elle note même que celle-ci prend « une allure d’expulsion ethnique » à propos des propriétaires étrangers. Elle participe à la création du CNRESR (Centre national de recherches en économie et sociologie rurales) au sein de l’Inraa à partir de 1970. Elle enseigne la sociologie rurale à l’université d’Alger et forme les étudiants sociologues en DEA. Elle est élue en 1975 déléguée à l’APW (Assemblée populaire de wilaya) à Alger : elle y éprouve à la fois l’impression d’être utile, par exemple pour les projets d’urbanisme, et « la frustration de ne pouvoir influer vraiment sur les grandes décisions » prises ailleurs.

Engagés tous deux dans des projets de réforme des études médicales (Pierre) ou des expériences de recherche pluridisciplinaire au CNRESR (Claudine), ils vivent cette période des années 1965-75 comme particulièrement féconde : ils voient en même temps la scolarisation massive des enfants (écoles et CEM pour garçons et filles), l’amélioration du système de santé et d’autres réformes utiles. Le bilan est cependant déjà plus mitigé pour Claudine (réformes agraires et rurales mal étudiées), qui voit en outre le CNRESR supprimé en 1975. Elle quitte alors le ministère de l’Agriculture et l’Inraa pour entrer au Crea devenu ensuite Cread ( Centre de recherche en économie appliquée au développement) créé par Abdellatif Benachenhou et d’autres économistes en 1975. De 1976 à 1988, Claudine est enseignante-chercheur au Cread dans l’équipe « Agriculture » qui comporte deux volets, l’un centré sur les questions économiques, l’autre sur les enquêtes de terrain. Elle participe en août 1976 à Torun (Pologne) au 4e Congrès de sociologie rurale qu’elle enseigne en faculté à Alger. Elle prépare activement sa thèse de doctorat qu’elle soutient à la Sorbonne en 1984, sous le titre La Terre, les Frères et l’Argent, dans laquelle elle étudie le rôle de la famille dans les exploitations et la pression des facteurs économiques. Mais l’enseignement de la sociologie est arabisé, et elle ne parle pas assez l’arabe pour continuer à enseigner directement ; elle encadre alors des magistères en arabe : la situation est ainsi plus difficile pour elle que pour Pierre.

En 1986, ils adhèrent à la « Ligue algérienne des droits de l’Homme » présidée par maître Miloud Brahimi, dont une enquête sur les prisons fait apparaître les dysfonctionnements du système judiciaire. En 1986, Chadli est président depuis 1979 (date de la mort de Boumediene) et le système du FLN parti unique arrive « à bout de souffle ». Deux ans plus tard, en octobre 1988, ce sont les émeutes estudiantines et de jeunes à Alger, Oran et ailleurs réprimées dans le sang. Quant à Pierre, il continue un travail fructueux à Alger et à l’OMS en tant qu’expert de la tuberculose dès 1981 et participe à un « Cours international sur la lutte antituberculeuse » organisé conjointement dans un pays développé (la France) et des pays en développement (l’Algérie pour lui et ses collègues) de 1983 à 1988, puis seulement en Algérie de 1989 à 1993 : au total, 250 médecins ont bénéficié de ce cours, dont 150 au moins venus des pays d’Afrique Noire. Ce travail collectif donne lieu à la publication du Cours international en deux volumes en 1988 sous le titre Planifier la lutte contre la tuberculose aujourd’hui. Pierre est envoyé en mai 1988 comme consultant OMS au Viet Nam, ce qui constitue pour lui une ouverture et une expérience élargie, puis à Téhéran en janvier 1990. Il y constate « la montée d’une vague de conformisme social et de religiosité ostentatoire », qui gagne aussi le Maghreb, puis l’Égypte dans ces mêmes années.

De 1988 à janvier 1994, ils vivent ce qu’ils appellent la « déconstruction », avec les dérives de la nouvelle politique algérienne : leur rêve d’une Algérie démocratique, socialiste et ouverte s’effondre avec l’arrivée des nouveaux responsables soumis, selon eux, à la Banque mondiale, au FMI, à l’économie de marché capitaliste d’un côté, et à la montée de l’Islam politique de l’autre. Ils avaient déjà déploré le « Code de la famille » en 1984 vu comme une régression et une islamisation des mœurs, et Claudine, plus critique que Pierre, parle de la révision constitutionnelle de 1989 (pluripartisme ouvert au FIS entre autres) comme d’une « couverture officielle à la liquidation progressive des acquis sociaux de la période antérieure et à l’intrusion de l’islamisme politique en Algérie », en particulier l’intolérance à l’égard des jeunes filles et des femmes. Cela aboutit à la victoire du FIS aux élections communales de 1991, puis au 1er tour des législatives en décembre 1991, et à l’arrêt du processus électoral en janvier 1992, vu comme un coup d’État par les uns et une nécessité démocratique par les autres. Après cet arrêt et la mise en place du HCE (Haut Conseil d’État) présidé par Mohamed Boudiaf rappelé de son exil au Maroc, un « Observatoire national des droits de l’Homme » (ONDH) est créé en février 1992 par celui-ci et Ali Haroun ; à la demande de ce dernier, Pierre Chaulet en devient vice-président aux côtés de Kamel Rezag Bara, président.

En 1992, Pierre est chargé de mission pour la Santé au sein du cabinet de Belaïd Abdesselam devenu Premier ministre et il développe la projet des « Programmes locaux d’action sanitaire » (Plas) qui sont présentés aux responsables locaux de la santé au cours de séminaires régionaux. Il mène aussi une révision de la nomenclature des médicaments, pour un contrôle des prix entre autres choses. En 1993, il est victime de menaces islamistes affichées contre lui à la mosquée de Koléa, et il est mis sous escorte de policiers gardes du corps. « Nos derniers mois en Algérie sont difficiles…L’espoir est perdu de vivre, à court terme dans une République moderne et démocratique, véritable Ètat de droit garantissant à tous ses citoyens l’égalité des droits et des devoirs, reflet institutionnel d’une société fraternelle, ouverte et tolérante », écrit-il. La désillusion est ressentie encore plus vivement par Claudine qui, outre cette déception politique, éprouve surtout une désillusion morale et culturelle : malgré leur choix de la nationalité algérienne, elle se sent « étrangère » en Algérie. Elle écrit : « Ce qui nous effrayait, c’était l’agressivité de certains musulmans qui étaient en train de se muer en majorité, qui ne ressemblaient en rien aux musulmans que nous avions connus et qui nous avaient accueillis fraternellement comme des militants et, plus tard, comme des concitoyens … Régnait un conformisme étouffant et notre vie de liberté était niée. Cela se doublait, pour nous et pour Luc (fils aîné), du fait que nous avions un type physique, une allure générale et surtout un nom (et des prénoms) qui criaient leur origine externe…Nous nous sentions – et nous nous sentons toujours – d’une certaine manière déconnectés des nouvelles façons de vivre, des nouvelles valeurs qui s’imposaient progressivement dans la vie sociale : le culte de l’argent, l’apparence de la réussite sociale par tous les moyens, la promotion des plus médiocres et des plus opportunistes » (1).

Pourquoi P. Chaulet est-il menacé d’être éliminé ? C’est un « kafir » (un mécréant), principal argument avancé contre lui. Il est pénible pour un Européen, a fortiori pour une Française d’origine métropolitaine devenue algérienne par choix, d’être vue comme une « étrangère », parce que non-musulmane dans une Algérie marquée par l’islamisme politique et un ressentiment anti-colonial toujours latent ou affirmé par certains.

De 1994 à 1999, c’est l’exil forcé. Les Chaulet quittent provisoirement l’Algérie en février 1994 et s’installent à Paris. Le mot « exil » marque bien l’arrachement pénible à leur enracinement algérien car, en même temps, ils sont « étrangers » en France sans passeport français. Il leur faut trouver hébergement et moyens de subsistance. Pour Pierre, c’est d’abord un cycle de conférences que lui assure l’OMS, d’abord en Afrique du Sud, Égypte, Maroc, Djibouti, puis à Genève où il rejoint l’équipe du « Programme mondial contre la tuberculose » du docteur Arata Kochi jusqu’en 1998. Claudine, elle, vit à Genève sans y travailler, passant une semaine par mois à Paris auprès de sa mère veuve. Pierre connaît un moment familial douloureux avec le décès de deux de ses sœurs, Suzette en 1995, et en 1996 Anne-Marie veuve de Salah Louanchi, longtemps inspectrice générale de l’enseignement primaire en Algérie. 1996, c’est aussi l’année de l’assassinat des moines de Tibhérine en avril, puis de Pierre Claverie évêque d’Oran avec son jeune chauffeur Mohamed le 1er août à son retour d’Alger (2), et celle de la mort du cardinal Duval en mai, tous proches du couple : cela est vécu douloureusement par eux, et en particulier par Pierre, pied-noir catholique pratiquant depuis toujours. Il reste vice-président de l’ONDH : un colloque est organisé à Alger par cet Observatoire en septembre 1997 sur le thème : « Formes contemporaines de la violence et culture de la paix ». Claudine prépare un rapport portant sur l’Algérie pour ce colloque intitulé « Comment une société peut-elle se guérir elle-même de la violence ? », dont le texte est publié dans les Actes du colloque et, en annexe, dans leur autobiographie. Ils reviennent à Paris en mars 1998 (Pierre, 68 ans, est atteint par la limite d’âge) et y restent jusqu’en mars 1999 : ils vivent un nouveau deuil avec le décès de la mère de Claudine en juin 1998.

Ils rentrent en Algérie en 1999, après l’élection à la présidence d’Abdelaziz Bouteflika. « Notre retour au pays, écrivent-ils, était à la fois une affirmation de notre fidélité à nos engagements antérieurs et un acte de confiance dans l’avenir de la société algérienne, même si certains aspects de la vie sociale et politique récente restent déconcertants et laissent de nombreuses questions en suspens. »

Pierre se réinsère dans le milieu professionnel et participe à la « Commission nationale de la réforme hospitalière » et aux travaux du « Comité national de lutte contre la tuberculose ». Claudine se met à la disposition du département de sociologie de l’université de Bouzareah où elle encadre des magistères et des doctorats, y compris à Constantine et à Oran avec le Crasc (Centre de recherches en anthropologie sociale et culturelle). Ils restent attentifs et sensibles à tout ce qui se passe en Algérie, leur pays : Pierre est satisfait de voir des étudiants en médecine « soucieux de se perfectionner, prêts à se dévouer pour leurs malades ». Claudine est plus désabusée, qui voit des jeunes gens et des jeunes filles passifs, pris dans un conformisme social et religieux. Ils participent à de nombreuses cérémonies commémoratives et à des colloques, en particulier sur Frantz Fanon en juin 2004 et avril 2005 où ils évoquent son parcours de psychiatre engagé et de militant anticolonialiste. Puis à un colloque organisé par leur ami Abdelkader Djeghloul en septembre 2005 sur la pensée politique algérienne : ils y font une intervention sur la question de la population coloniale en Algérie de 1940 à 1960, avec une mise en perspective historique critique dans laquelle ils distinguent les choix politiques divers des pieds-noirs, des ultras de l’Algérie française aux libéraux, en passant par la grande masse de ceux qui ont subi les « événements » sans bien les comprendre, sans oublier le petit nombre qui, comme eux, a fait le choix de l’Algérie indépendante (3).

En 2006, ils sont affectés par la mort d’amis de longue date, Jacques Charby, André Mandouze, Pierre Roche. En juin 2007, ils participent à une cérémonie d’hommage organisée pour le 17e anniversaire du décès de leur beau-frère Salah Louanchi, où Pierre rappelle ses activités de permanent des SMA, de militant du PPA (Parti du peuple algérien), et d’initiateur de l’AJAAS et de Consciences Maghribines, précisément avec Mandouze, Roche, lui Chaulet et d’autres. Enfin, ils se sont rapprochés politiquement de l’ANR (Alliance nationale républicaine), parti laïque fondé en 1995 par leur ami Redha Malek, ancien premier ministre jusqu’en 1994.

Conclusion : bilan provisoire
Dès le début des années 1950, et plus encore dès le 1er novembre 1954, Pierre Chaulet se sent et s’affirme, par sa naissance et ses engagements contre toutes les formes d’injustices sociales et ethniques et les comportements racistes, algérien à part entière, de même que Claudine fera avec lui le choix d’être algérienne peu après, même s’ils sont restés plus francophones qu’arabophones et surtout non-musulmans. Ils voulaient, comme Pierre Claverie, une Algérie plurielle et tolérante : un rêve peut-être. Ils considèrent qu’ils ont vécu deux exils, celui de 1957-62 à Tunis du fait des autorités françaises, celui de 1994-1999 à Genève et Paris du fait des menaces islamistes contre eux. Ils ont vécu aussi le problème de l’éducation « algérienne » de leurs enfants ; il peut y avoir un « porte-à-faux » pour ceux-ci, pour Luc obligé de s’affirmer musulman pour épouser une Algérienne, et pour leurs filles, Anne mariée à un Français et vivant en France, Ève divorcée d’un Algérien et remariée, partageant sa vie entre la France et l’Algérie.

En dépit des difficultés et des malentendus parfois, ils restent fiers de leurs choix et du travail qu’ils ont pu accomplir dans leur pays de naissance ou d’adoption. Non-musulmans et français d’origine, ils écrivent : « Alors que nous ne nous sommes jamais sentis exclus comme algériens, de plus en plus nous nous sentons perçus comme des étrangers parce que non-musulmans. Par respect pour ce que nous ont appris nos parents, en continuité avec l’éducation que nous avons tenté de donner à nos enfants, par fidélité aux principes qui ont fait de nous des Algériens, nous ne pouvons accepter ce marquage indélébile (religieux ou autre) par les choix antérieurs des générations passées ». Interrogés sur leur parcours par le journal El Watan le 14 avril 2011, à la question finale « Et l’avenir, comment le voyez-vous ? », Pierre répond :

À court terme, confus et mouvementé. À plus long terme avec confiance, parce que je pense que l’intelligence collective reprendra le dessus et que je fais confiance aux nouvelles générations qui ont été formées grâce à – et après – l’indépendance. C’est eux qui poseront les problèmes en termes nouveaux et sauront trouver, je l’espère, de bonnes solutions, en tout cas meilleures que celles qui ont été apportées jusqu’à présent. C’est leur intérêt et celui de leurs enfants.

Pierre est décédé en octobre 2012 avec cette confiance et cette espérance chrétienne. Pierre et Claudine Chaulet font partie, comme écrit Gilbert Meynier, de cette « mince frange » de pieds-noirs et de juifs d’Algérie qui « non-musulmans, avaient eux, de manière vitale, besoin d’une nation algérienne […] et qui furent d’authentiques algériens, étrangers qu’ils étaient tant au communautarisme de base des arabo-berbères qu’au communautarisme mahométan universel ; et parce qu’ils avaient pratiquement rompu avec leur communauté originelle tant leur engagement était exceptionnel » (4). Un choix risqué qu’ils ont assumé jusqu’à la fin de leur vie avec un courage qui mérite d’être reconnu à sa juste valeur (5).

En annexe, je terminerai en saluant l’engagement de coopérants exemplaires, comme Renée Chéné appelée par l’abbé Scotto et venue de sa Vendée pour se mettre pendant la guerre de libération au service des populations déshéritées d’un bidonville de la banlieue d’Alger, à l’expérience de qui Germaine Tillion a fait appel pour les Centres sociaux éducatifs. Ou encore le médecin Jacqueline Grenet engagée dans le service pédiatrique de l’hôpital Nedir de Tizi-Ouzou (1963-77), appelée par Mgr Duval et la communauté chrétienne d’Alger, décédée en mai 2012, âgée de 104 ans, à qui Saïd Karamani a rendu un bel hommage lors de ses obsèques à Paris le 1er juin.
http://www.algerie1.com/actualite/la-mo ... nest-plus/

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Message par AAF 2020 »

Le moudjahid Maurice Baglietto n’est plus

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Dés que la nouvelle de sa mort est tombée, le mouvement démocratique et social (MDS) a tenu à lui rendre un vibrant hommage en rappelant que le moudjahid Maurice Baglietto était engagé dans la lutte politique et syndicale dès son plus jeune âge. Cet enfant de Belcourt, né le 23 mai 1925, est le fils d’un comptable, membre du Parti communiste algérien. Sa jeunesse a largement déterminé ses engagements futurs. Dès l’âge de 16 ans il est membre de la jeunesse communiste. Tourneur/ajusteur à la Brasserie d’Algérie, il entre à la CGT. En 1945 il adhère au PCA.

Momo a toujours connu l’égalité avec les Algériens dans son quartier populaire. « On a grandi ensemble, travaillé, galéré, manifesté ensemble. » Militant, engagé pour la libération nationale, il fut interné au camp de Lodi (à cent kilomètres d’Alger, on y enfermait les « pieds noirs » soupçonnés de sympathie avec le FLN) et expulsé au printemps 1962.

A Marseille, avec femme et enfants, il trépignait. Il voulait retrouver sa terre natale. « Dès l’indépendance proclamée, on a pris le bateau pour Alger. A bord, les gens nous regardaient bizarrement. Nous expliquions que nous rentrions chez nous, ils demandaient : mais chez vous, ce n’est pas en France ? Je voulais retrouver ma maison, mon travail à la brasserie et mes abeilles dans la Mitidja. »

A 17 ans, Momo avait été initié aux ruches et aux abeilles, ces travailleuses discrètes et inlassables. M. Botton, alors Inspecteur général de l’apiculture en Algérie, rassurait alors Momo : Tu es capable de diriger une ruche. Il finira par en diriger 80, dans la Mitidja, durant la décennie de barbarie islamiste.

Toujours à l’avant-garde, il aura été un de ces militants infatigable qui du PAGS au MDS, en passant par Ettahadi et le Rafd, et aura vécu les moindres frémissements politiques de l’Algérie après l’indépendance. Doté d’un idéal viscéralement chevillé au corps, il voulait toujours se rendre utile. Alors que les militants du PAGS étaient réduit à un retour à la clandestinité à cause du terrorisme islamiste qui avait embrasé l’Algérie, il refuse de quitter l’Algérie pour Paris et se mobilise pour soutenir les groupes de Patriotes mis en place dans la Mitidja par Mohamed Sellami, alors cadre d’Ettahadi.

Fidèle à tous ses camarades il évoquait avec émotion la mémoire d’Yveton, d’Henri Maillot et de Maurice Audin qu’il avait croisé chez lui, sans savoir alors qui il était. Il était de tous les hommages pour perpétuer leur combat. Son impressionnante opiniâtreté dans la lutte méritait le film-mémoire que préparaient ses camarades et amis.

Témoignage de la constance de son engagement, il racontait à qui voulait l’entendre comment « un jour, pendant le terrorisme des années 1990, un policier m’a arrêté à un barrage. Quand j’ai montré ma carte d’ancien moudjahid, il n’en revenait pas qu’un « Français » ait combattu pour l’indépendance. Alors, il m’a fait le salut militaire. » C’était la reconnaissance d’un jeune algérien, alors que le pays était de nouveau dans la tourmente, qui lui allait droit au cœur.

La direction et les militants du MDS ont tenu ainsi à rendre hommage au moudjahid Maurice Baglietto tout en assurant sa famille de leur soutien et de leur profonde affection.
http://www.algerie1.com/actualite/le-mo ... nest-plus/

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Re: Guerre de Libération : Les Amis de l'Algérie

Message par numidia »

Fernand IVETON mort à 31 ans pour que vive l'Algérie libre, l'Algérie anti-coloniale, l'Algérie anti-impériale

bien plus qu'un ami
un véritable résistant
un vrai moudjahed
un homme de convictions, épris de justice et de dignité

un homme guillotiné pour que vive l'Algérie ... son nom combien d'Algériens aujourd'hui le connaisse ? son implication, son parcours combien d'Algériens en ont entendu parlé ?

combien de fois avons-nous déjà vécu cela ? les mêmes égarements "bureaucratiques" (ce mot est l'arbre qui cache la forêt, les vrais irresponsables qui de leur bureau font des choix suicidaire, ils font de l'oubli mémorielle leur tasse de thé et nous l'impose)
combien de noms de Révolutionnaires femmes ou hommes ont été ainsi retirés de la place publique ou des façades d'écoles ou d'autres lieux qui sont les symboles de notre République algérienne acquise au prix du sang de ces femmes et de ces hommes
si peu nombreux mais si courageux, ils ont porté toute la Révolution, ils ont écrit la liberté, la justice, la dignité, la souveraineté en lettres d'or dans l'histoire

que nos gouvernants soient maudits si ils continuent à faire disparaître de la mémoire et des lieux publics des noms et des parcours, des personnalités si grandes, si fortes, notre histoire, notre fierté !

https://secure.avaaz.org/fr/petition/Mi ... n/?aMwhQhb
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Message par BerrouLana »

Rip pour tous ceux qui ont aimé l'Algérie et la liberté plus que de nombreux de nos compatriotes.

Pour info, l'émission "les vendredis de l'histoire" sur la chaîne Canal Algérie va aborder ce vendredi les français et les étrangers qui ont contribué pour l'indépendance de l'Algérie, des témoignages intéressants et émouvants. Des films documentaires seront diffusés.

à voir...
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Re: Guerre de Libération : Les Amis de l'Algérie

Message par AAF 2020 »

Célébration à Belgrade du 90e anniversaire de Stevan Labudovic, cameraman de la Révolution algérienne

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BELGRADE - Une cérémonie de célébration du 90e anniversaire de Stevan Labudovic, cameraman de la Révolution algérienne, a été organisée mercredi au siège du Musée de l'Histoire de Yougoslavie à Belgrade (Serbie) par l'Association des amis de l'Algérie avec le soutien de l'Ambassade d'Algérie.

Né en 1926, Stevan Labudovic a pu, grâce à sa camera, immortaliser des moments historiques de l'Algérie en pleine guerre de libération.

Il décida en 1959 d'entrer en Algérie, via la Tunisie, pour filmer et photographier des séquences de la guerre dans les Aurès.

Etaient présents à cette cérémonie, le ministre de la Défense de Serbie, Zoran Djordjevic, le président de la municipalité de Berane (Montenégro), ville natale de Stevan Labudovic, Dragoslav Scekic, des membres du corps diplomatique arabe et africain et des amis de l'Algérie.

Dans son allocution d'ouverture, l'Ambassadeur d'Algérie à Belgrade, Abdelhamid Chebchoub, a mis en exergue "l'engagement de Stevan Labudovic aux cotés du peuple algérien lors de la lutte de libération nationale", soulignant "l'impact de ses images dans l'opinion internationale en rapportant la réalité du combat algérien face à la propagande coloniale".

Il a noté, à ce titre, que "Stevan Labudovic a été décoré par le président Abdelaziz Bouteflika à l'occasion du cinquantième anniversaire" de la Révolution de Novembre 1954.

Le ministre de la Défense serbe a souligné, pour sa part, "l'importance de l'œuvre de Stevan Labudovic dans l'enrichissement des archives nationales serbes notamment pour les générations futures afin qu'elles apprennent la vérité sur la lutte du peuple algérien pour la liberté et la dignité".

Il a rappelé, par la même occasion, "les reportages effectués par Stevan Labudovic sur les différents Sommets du mouvement des Non-alignés, soulignant "le rôle moteur de l'ex Yougoslavie dans ce mouvement".

Des images d'archives du caméraman sur les opérations menées par l'Armée de libération nationale (ALN), ainsi que sur les visites effectuées en Yougoslavie par les défunts présidents Houari Boumediène et Chadli Benjedid et celles effectuées par le président Abdelaziz Bouteflika, en sa qualité de ministre des Affaires étrangères et celles de Tito en Algérie, ont été diffusées à l'occasion de cette célébration.

Les présents ont eu droit à des séquences d'un film documentaire sur Stevan Labudovic en cours de réalisation, par la cinéaste Serbe Mila Turajli et dont la sortie est prévue pour fin 2017.
http://www.aps.dz/algerie/51212-c%C3%A9 ... 3%A9rienne

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Message par AAF 2020 »

Décès de Charles-Henri Favrod, journaliste et écrivain suisse ami de la Révolution algérienne

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ALGER- Le journaliste, photographe et écrivain suisse, Charles-Henri Favrod, ami de la Révolution algérienne, est décédé dimanche à l'âge de 89 ans, a-t-on appris de son entourage.

Le défunt, né en 1927, s'est intéressé à l'Algérie depuis 1952, année durant laquelle il réalisa son premier reportage sur la situation en Algérie pour le compte de la Gazette de Lausanne. Il publia, en 1956, une interview de Ferhat Abbas, devenu par la suite, le président du Gouvernement provisoire de la République algérienne (GPRA).

Charles-Henri Favrod, qui a aidé des militants algériens, en Suisse et ailleurs, joua un rôle important dans la prise de contacts en Suisse entre des responsables de la Révolution et les autorités françaises en vue des négociations qui déboucheront sur les accords d'Evian signés le 18 mars 1962.

Il est l'auteur de plusieurs ouvrages sur l'Algérie, notamment "La révolution algérienne" et "Le FLN en Algérie", publiés respectivement en 1959 et 1962.

"Je dois beaucoup à l'Algérie. C'est elle qui m'a donné une conscience politique", témoigna-t-il.

Charles-Henri Favrod était aussi le fondateur du Musée de l'Elysée à Lausanne (Suisse)
http://www.aps.dz/algerie/51914-d%C3%A9 ... 3%A9rienne

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Message par AAF 2020 »

Décès de la moudjahida Danièle Djamila Amrane Minne

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ALGER - L'ancienne moudjahida Danièle Djamila Amrane Minne est décédée à l'âge de 78 ans, a-t-on appris samedi auprès du ministère des Moudjahidine.

Née le 13 août 1939 à Neuilly-sur-Seine (France), Danièle Djamila Amrane Minne, qui était une fervente militante de la cause nationale, avait intégré les rangs de l'Armée de libération nationale (ALN) de 1956 à 1962.

Après l'indépendance, Danièle Djamila Amrane Minne, a opté pour la nationalité algérienne et travaillé à l'université d'Alger puis devenue en 1999 professeur d'histoire et d'études féminines à l'université de Toulouse.

La défunte était également auteur de plusieurs ouvrages littéraires ainsi que des poèmes. Parmi ses publications, "Les femmes algériennes et la Guerre de libération nationale" (1989).

Daniele Djamila Amrane Minne sera inhumée dimanche à Bejaia. Le ministre des Moudjahidine Tayeb Zitouni a envoyé un message de condoléances à la famille de la défunte.
http://www.aps.dz/algerie/53185-d%C3%A9 ... rane-minne
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Message par BerrouLana »

AAF 2020 a écrit :
Décès de la moudjahida Danièle Djamila Amrane Minne

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ALGER - L'ancienne moudjahida Danièle Djamila Amrane Minne est décédée à l'âge de 78 ans, a-t-on appris samedi auprès du ministère des Moudjahidine.

Née le 13 août 1939 à Neuilly-sur-Seine (France), Danièle Djamila Amrane Minne, qui était une fervente militante de la cause nationale, avait intégré les rangs de l'Armée de libération nationale (ALN) de 1956 à 1962.

Après l'indépendance, Danièle Djamila Amrane Minne, a opté pour la nationalité algérienne et travaillé à l'université d'Alger puis devenue en 1999 professeur d'histoire et d'études féminines à l'université de Toulouse.

La défunte était également auteur de plusieurs ouvrages littéraires ainsi que des poèmes. Parmi ses publications, "Les femmes algériennes et la Guerre de libération nationale" (1989).

Daniele Djamila Amrane Minne sera inhumée dimanche à Bejaia. Le ministre des Moudjahidine Tayeb Zitouni a envoyé un message de condoléances à la famille de la défunte.
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Allah yarhamha, une autre perte pour notre Algérie
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Message par soudard »

Je pense qu'elle se considérait comme une algérienne et pas comme une amie de l'Algérie.

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Re: Guerre de Libération : Les Amis de l'Algérie

Message par AAF 2020 »

AUX ORIGINES DE L'AMITIÉ ALGERO-CHINOISE : 2. La solidarité par les actes

Au printemps 1959, le GPRA décide de dépêcher en Chine une délégation militaire de haut niveau, la première de l'histoire, pour demander au gouvernement chinois une aide en armement pour les combattants de l'ALN. Composée de onze membres dont cinq du CNRA, elle est dirigée par le Commandant Omar Oussedik, secrétaire d'Etat à la guerre. L'accueil qui lui a été réservé est à la mesure du combat du peuple algérien, héroïque, pour sa liberté.
Un autre épisode de notre mission qui aura une conclusion heureuse avait fait vivre deux heures de stress à notre délégation. C’était nos entretiens avec le chef d’état-major de l’armée chinoise.
Initialement, nous devions être reçus par le maréchal Pen Tho Khay, mais ce dernier se trouvait en Pologne pour assister à une réunion du Pacte de Varsovie.
Le chef de l’état-major qui avait reçu des instructions pour nous donner entière satisfaction (nous ne le savions pas encore) avait voulu tester la délégation et mieux la comprendre. Etions-nous venus uniquement pour chercher de l’aide ? Etions-nous venus pour exercer une sorte de chantage sur le mouvement communiste mondial ?
En tant que chef de la délégation et après consultation du noyau d’officiers supérieurs, Omar Oussedik a tracé un tableau de notre guerre. Il a notamment mis l’accent sur la nécessité d’apporter une aide logistique à l’ouest de notre territoire.
En effet, par l’est et par le biais de l’Egypte, nous pouvions, à travers la Tunisie et la Libye, recevoir de l’armement. Par contre, de l’ouest, c’était excessivement difficile. Le gouvernement marocain n’avait pas passé de commande d’armes pour le compte de l’ALN. Nous étions donc obligés, pour nous fournir, soit de nous adresser à des trafiquants, soit de chercher une aide auprès des Espagnols. Ces derniers nous en avaient livré dans le passé. Ces armes avaient été alors partagées équitablement par Boudiaf entre l’ALN et l’Armée de libération marocaine. Cette dernière avait ensuite engagé le combat contre l’Espagne à Ifni et au Sahara occidental.
L’Espagne était mortifiée de constater que les armes fournies à l’Algérie par un général espagnol avec l’accord tacite de son gouvernement étaient utilisées contre sa propre armée. Cette source s’est évidemment tarie. Nous avions donc accordé la priorité à l’armement de l’Ouest. Nous avions également songé à des possibilités d’envoi d’armes par sous-marins à partir de l’Albanie vers la presqu’île de Collo en Wilaya II. Les Chinois nous avaient écoutés avec beaucoup d’attention. Ensuite avait commencé ce que nous appellerons le jeu du chat et de la souris.
Omar Oussedik était en l’occurrence la souris, le chat étant, bien entendu, le chef de l’état-major de l’armée chinoise. Après nous avoir fait préciser la quantité d’armes que nous souhaitions, ce dernier a déclaré en substance : «La Chine compte une armée régulière de 5 millions d’hommes très bien armés et prêts au combat, qu’elle avait une industrie de guerre, ainsi qu’une milice de 90 millions d’hommes qui n’étaient pas armés comme les dirigeants chinois le souhaitaient. Et que par conséquent, la Chine aurait des difficultés à nous fournir du matériel militaire.»
Or, c’était l’un des buts de la mission qui nous avait été impartie par le GPRA, pour ne pas dire la mission première. Le deuxième point concernait l’aide financière.
A l’époque, le budget de l’Algérie était de 8 milliards dont 4 milliards nous étaient fournis par la Fédération de France du FLN. Si jusqu’en 1957, le peuple nous fournissait l’alimentation, l’habillement, les chaussures, les abris, l’argent, à partir de cette date les problèmes de ravitaillement devenaient assez difficiles. Et ce, en raison de l’expansion des zones interdites et de la multiplication d’internements qu’ils appelaient par euphémisme centres de regroupement, afin de nous isoler du peuple.
Le chef de l’état-major nous dit alors : «Si chaque Chinois sacrifie quelques grains de riz, quelques morceaux de sucre, quelques brindilles de thé à la révolution algérienne, vous n’auriez plus de problèmes de ce genre. Mais malheureusement, la Chine est un pays sous-développé et pauvre. Notre peuple arrive tout juste à s’alimenter. Par conséquent, l’aide que vous demandez s’avère difficile, aussi bien en ce qui concerne l’approvisionnement de l’ALN, que des réfugiés.» Et le chef de l’état-major avait alors ajouté : «Il suffirait que les 700 millions de Chinois vous donnent chacun quelques centimes pour que vous ayez votre budget de guerre. Mais la Chine ne peut pas vous donner de l’argent.»
Nous avons confirmé que nous comprenions la Chine.
Nous avons émis le souhait de connaître son expérience en matière de guerre révolutionnaire. Là, le chef de l’état-major sourit et nous répondit que la Chine mettait à notre disposition sans aucune réserve toute son expérience. Ce n’était certes pas l’une des missions que nous avait fixées le gouvernement. Nous en avons, néanmoins, exprimé notre satisfaction. Puis notre chef de la délégation prit la parole pour déclarer que nous voulions renforcer les liens d’amitié entre l’Armée populaire chinoise et l’armée de libération nationale algérienne. Nous souhaitions également mieux connaître l’armée chinoise, son rôle, sa mission et mieux faire comprendre et connaître notre armée de libération, sa composante, ses objectifs, ses aspirations, son rôle pendant la guerre et celui que nous lui fixons pour l’après-indépendance.
Ce vœu émis a été accueilli avec une grande satisfaction par les Chinois. Après ces premiers échanges, le chef d’état-major nous demandera si nous n’étions pas déçus en raison de la non-satisfaction des premières demandes formulées et si cela n’allait pas influer sur le moral des combattants.
Omar Oussedik reprit la parole pour répondre au nom de la délégation, au nom de l’ALN et du CNRA. Le FLN, en déclenchant la lutte de libération nationale, savait, au départ, qu’il ne fallait compter que sur soi-même. L’aide de nos amis, de nos frères à l’extérieur ne pouvait et ne devait pas être négligée, mais que l’indépendance ne pouvait être que l’œuvre de notre peuple. La révolution algérienne se savait engagée dans une lutte difficile et de longue durée. Et dans cette lutte, il nous fallait gagner aussi bien des alliés objectifs que des alliés subjectifs, mais aussi l’opinion publique internationale encore hésitante. Nous ne sommes pas mécontents de notre mission, bien qu’elle ne soit pas encore terminée et que, de toute façon, l’ALN continuera à se battre avec la même détermination et la même volonté de victoire. L’épreuve pour notre délégation semblait être terminée.
Dans un éclat de rire, le chef de l’état-major reprit la parole en disant : «Votre mission, comme vous venez de le déclarer, n’est pas en effet terminée. Elle commence à peine. Vous vouliez armer 120 000 hommes, n’est-ce pas camarades algériens ? Est-ce que des armes pour 180 000 hommes vous donneraient satisfaction ?» Nous n’en espérions pas tant. Pour clore cet entretien, le chef de l’état-major recommanda au général Yang, notre accompagnateur — ce général avait participé à la longue marche — de nous montrer des unités militaires en manœuvre et des usines de guerre au sein desquelles nous pouvions effectuer notre choix des armes, du canon à la mitraillette, et du fusil de guerre en passant par les lance-flammes. Les visages s’éclairèrent, toute la délégation était heureuse.
Abordant la question de l’aide financière, les Chinois mettaient à notre disposition le budget de tout une année de guerre dans une banque à Genève. Et le chef de l’état-major de suggérer : «Vous pouvez de cette façon laisser vos émigrés économiquement en paix et ne pas les saigner par des cotisations lourdes.» Ce à quoi Omar Oussedik répondit que la cotisation était la marque d’un engagement au sein du FLN et le militant qui se trouvait en France devait s’acquitter de ce devoir. En aucun cas le CNRA et le GPRA ne pouvaient accepter la suppression de cette cotisation.
Le chef de l’état-major reconnut là une attitude militante qu’il appréciait. Quant aux problèmes des couvertures, de l’habillement et de la nourriture pour les réfugiés, c’était à ses yeux une si petite chose qu’il ne fallait même pas la mentionner. Il nous avait alors assurés que nous allions recevoir tout cela sans aucun problème.
Restait la question concernant l’armement pour l’Ouest et celle des sous-marins. Le chef de l’état-major déclara que la Chine ne possédait pas une flotte susceptible de répondre à cette demande. Et qu’il appartenait à la révolution algérienne d’en discuter avec les Soviétiques. Nous avions saisi la nuance. Les Chinois ne pouvaient évidemment pas prendre un engagement au nom de l’Union soviétique.
Pour mieux comprendre notre mission en Chine et lui rendre sa véritable dimension, il importe à notre avis de la relater dans ses moindres détails. Au départ, nous avions dans nos valises nos uniformes de l’ALN, nos épaulettes ainsi que nos grades. La délégation militaire était en civil.
Nous avions fait escale à Prague, où nous avions été salués par l’attaché militaire chinois. Et nous avons passé la nuit à Moscou où l’ambassade de Chine nous avait pris en charge.
Le lendemain, nous avons continué sur Irkoutsk puis Oulan-Bator où nous avons également été reçus par des attachés militaires chinois. Nous avions donc fait plusieurs escales dans des pays socialistes, mais ces derniers n’avaient prévu aucun accueil officiel à notre délégation. Nous pouvions facilement apparaître comme un groupe de touristes. Pourtant, les autorités de ces pays étaient averties de notre passage, puisque les visas nous avaient été accordés au Caire avant notre départ.
A notre arrivée, nous avons ressenti une profonde émotion, la garde d’honneur de l’Armée populaire chinoise, en grande tenue, nous attendait. Nous recevions un accueil réservé aux délégations d’Etat. Accueilli à la passerelle par le maréchal Che Yi, premier vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères, notre chef de délégation a salué la garde d’honneur de Pékin qui lui présentait les armes.
Puis, nous avons écouté religieusement les hymnes nationaux de nos pays respectifs. Dans l’avion chinois que nous avons pris à Oulan-Bator à destination de Pékin, il y avait avec nous un interprète qui parlait parfaitement le français. Il nous avait mis au courant de l’accueil qui allait nous être réservé. Nous avons donc préparé le discours que devait prononcer Omar Oussedik, notre chef de délégation, et avons revêtu nos uniformes.
A l’arrivée, après présentation des membres du gouvernement et des attachés militaires accrédités à Pékin, le chef de la délégation est monté à la tribune où l’avait précédé le maréchal Chen Yi.
Dans une brève allocution, il réaffirmait la volonté du gouvernement algérien et du CNRA de renforcer les relations d’amitié entre l’Armée populaire chinoise et l’Armée de libération nationale, toutes deux forgées dans un même combat pour l’indépendance et le progrès social.
D’emblée, nous avons montré les dispositions dans lesquelles nous étions, en tenant un langage dont la signification ne pouvait échapper à aucun observateur, et en particulier aux Chinois que nous avons appelés camarades.
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/ ... 217&cid=41

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Re: Guerre de Libération : Les Amis de l'Algérie

Message par AAF 2020 »

Témoignage :AUX ORIGINES DE L'AMITIÉ ALGÉRO-CHINOISE : Des fellagas à Pékin

Souvent, lorsque je traverse Alger, je suis attiré par les grands chantiers aux palissades frappées des noms d'entreprises en caractère chinois. Ces fourmilières industrieuses et affairées toutes à leur besogne ne manquent jamais de réveiller dans mon esprit le souvenir ici gravé dans ma mémoire de mon voyage en Chine avec la délégation militaire de l'ALN conduite par mon frère de combat et ami, le commandant Omar Oussedik, alors secrétaire d'Etat à la guerre du GPRA.
Les lignes qui vont suivre et qui retracent dans le détail notre mission historique dans ce fabuleux pays rapportent une conversation échangée avec Si Omar, notre chef de mission, au début des années 80.
Enregistrée, décryptée et transcrite il y a de cela plus de 35 ans, je la livre telle quelle aux lecteurs du Soir d'Algérie.
En ce printemps de l'année 1959 se crayonnait l'échéance encore floue des premières négociations entre le FLN et le gouvernement français, qui allait avoir lieu en juin à Melun, non loin de Paris. Un terme aux contours mal définis, comme une ébauche grossière d'une œuvre à façonner, c'est à cette période que je découvrais la Chine... Géant qui s'éveillait sous les yeux d'un monde éberlué de tant de puissance contenue.
Le GPRA avait décidé de l'envoi de la première délégation militaire en République populaire de Chine. Le pays-continent de Mao Zedong, Mao Tsé-Toung, selon l'ancienne orthographie.
La mission que nous avions accomplie nous a profondément marqués. Elle nous a permis de découvrir un univers nouveau pour nous. Un monde qui pesait d’un poids certain dans les affaires internationales. Un pays en mouvement qui contestait l’ordre établi. Un ordre où la division était nette entre les Etats exploiteurs et les nations prolétaires que Frantz Fanon appelait «les damnés de la terre».
Cette mission, nous l’avons effectuée quelques mois après la proclamation du GPRA et tout juste un mois après que Omar Oussedik et moi-même avions gagné l’extérieur.
Le GPRA était alors reconnu par quatre pays. Tous membres de la communauté socialiste mondiale au sein de laquelle l’URSS jouait encore un rôle de premier plan, un leadership à l’époque indiscuté. Il s’agissait de la Mongolie extérieure, de la Chine populaire, du Vietnam et de la Corée du Nord.
Lorsque nous avons été désignés pour nous rendre en Chine et au Vietnam, les objectifs définis étaient précis et limités.
Le GPRA désirait obtenir de la Chine une aide matérielle en armes, une aide financière du ravitaillement pour les réfugiés, mais aussi une aide politique, car il faut reconnaître que l'engagement des pays socialistes européens à l’égard de notre révolution était empreint de certaines réserves.
Dirigée par le commandant Omar Oussedik, secrétaire d’Etat à la guerre, la délégation comptait onze membres dont cinq du Conseil national de la Révolution algérienne (CNRA) : le commandant Omar Oussedik, le colonel Si Sadek, le commandant Kaïd Ahmed, le commandant Kaci et moi-même.
D’un commun accord et sans consulter le GPRA, la délégation s’était fixé de nouveaux objectifs. Les délégués membres du CNRA avaient décidé de rechercher un éclaircissement des relations FLN-PCF. Ce dernier avait, certes, eu des rencontres avec des délégations du Front, mais les accords décidés n’étaient exécutoires qu’après l’approbation de son Bureau politique (BP). Or, jusqu’alors, aucun accord n’avait été mis en application.
Au plan militaire, il s'agissait d’obtenir la livraison d’armes à la frontière ouest de notre pays et de rechercher la possibilité de débarquer des armes dans la presqu’île de Collo par sous-marin via l’Albanie où l’URSS disposait des bases.
Nous avions donc exprimé le souhait de rencontrer une délégation du PCF, munie du pouvoir de son BP. Il était de tradition que le PCF assiste aux manifestations organisées par la Chine à l’occasion de la fête nationale et du 1er Mai. Nous étions alors à la veille de la fête internationale du travail. A la demande du maréchal Chèn Yi, vice-Premier ministre et ministre des Affaires étrangères de la République populaire de Chine, nous avons prolongé notre séjour afin de donner le temps matériel à une délégation responsable du PCF de nous rejoindre à Pékin.
Nous avions donc élargi le mandat qui nous avait été fixé. Nous n’éprouvions aucune inquiétude à le faire, convaincus d’être approuvés. Il est vrai que certains membres du GPRA craignaient de voir la révolution algérienne, accusée d’être au service du communisme, apparaître comme une force d’appoint au mouvement international et ainsi d’être partie prenante, non seulement au plan politique, mais aussi idéologique, dans la guerre froide qui sévissait alors.
Les anciennes colonies d’Occident étaient presque toutes dirigées par des bourgeoisies compradores, étroitement liées à l’impérialisme. Certaines d’entre elles avaient même adhéré à des pactes militaires anticommunistes. Par ailleurs, même les promoteurs de la conférence de Bandoeng entendaient affirmer une stricte neutralité vis-à-vis de Moscou et de Washington, en sacrifiant parfois la cause des mouvements d’émancipation.
Le GPRA n’était pas reconnu par tous les Etats participant à la conférence et ces derniers refusaient de soutenir le combat du peuple vietnamien, quand ils ne soutenaient pas directement les Etats-Unis dans leur guerre d’agression en Indochine.
Notre ami M’hamed Yazid avait été chargé par le FLN de prendre contact avec des membres du gouvernement français pour une solution négociée, ainsi qu’avec des délégués du PCF. Il y a lieu de rappeler qu’avant le déclenchement de la lutte armée, M’hamed Yazid avait effectué une mission de prospection en Yougoslavie afin de former des chefs de guérilla, en particulier au plan militaire. Belgrade avait accueilli avec réserve cette démarche. Elle ne connaissait pas le nationalisme algérien et craignait une manœuvre de provocation susceptible de nuire à ses relations avec l’Occident. Cependant, cette mission aura plus tard des effets bénéfiques. En effet, la Yougoslavie, consultée de nouveau pour une formation militaire, se souviendra et appréciera la confiance dont elle jouissait auprès des Algériens. Elle nous accordera une aide conséquente tant par solidarité internationaliste que pour appuyer le nationalisme arabe animé par Nasser, ce dernier se trouvait alors dans une phase ascendante. Avant de quitter Le Caire, nous avions discuté longuement de ces questions avec M’hamed Yazid.
En demandant le parrainage du Parti communiste chinois à une nouvelle réunion, nous sortions du tête-à-tête en introduisant un partenaire qui avait un poids considérable dans le monde, en raison de la victoire qu’il avait remportée sur l’impérialisme en libérant 700 millions de Chinois.
Mais le PCF n’a pas voulu d’une réunion à laquelle assisteraient les Chinois et par conséquent a refusé d’envoyer une délégation de haut niveau.
Pour les Chinois, notre démarche constituera un élément de poids dans leur appréciation du FLN. Elle écartera totalement et radicalement les accusations d’anticommuniste qu’avait lancées le PCF contre le FLN.
Les Chinois écarteront ces accusations, d’autant mieux que notre délégation avait appris à la suite de confidences faites au maquis par Abdelkader Babou (1) à Si Omar Oussedik, que les propositions avancées par le FLN, en 1954, au PCA avaient déjà été suggérées par Mao Zedong, au Parti communiste algérien en 1952, lors de la visite d’une délégation de ce parti dirigée par Babou en Chine. Des propositions en tout point conformes à ce que nous avions offert au PCA avant le déclenchement de la lutte armée, à savoir la dissolution du parti et l’entrée de tous ses militants au sein du MTLD-PPA pour une plus grande mobilisation des masses populaires en vue de préparer la guerre de Libération nationale. Dans l’optique de Mao, les militants communistes devaient, en raison de leur doctrine et de leur idéologie, jouer un rôle de direction. Nous n’avions naturellement pas manqué de rappeler ces suggestions lorsque Mao nous avait fait l’honneur de nous recevoir. Par ailleurs, nous voulions que le PCF définisse clairement sa position face à une lutte de libération nationale contre laquelle son pays mobilisait les citoyens français. Nous attendions de lui une plus grande fidélité aux principes de Lénine. Que le PCF ait refusé de nous rencontrer avait beaucoup déplu aux dirigeants chinois. Il apparaissait clairement à travers notre démarche qu’un mouvement national à prédominante nationaliste faisait plus confiance au Parti communiste chinois que le Parti communiste français qui, à l’époque, était le premier parti communiste européen. Ceci a contribué à un engagement plus effectif de la Chine à l’égard de la révolution algérienne. Et c’est pourquoi, en nous recevant, les Chinois ont eu la conviction que les accusations de compromission du FLN avec l’impérialisme mondial en cas de victoire n’étaient pas fondées. Tout comme ils étaient convaincus que, sur le plan social, la révolution algérienne envisageait de profonds bouleversements, d’une part, et que d’autre part, sur le plan international, elle se situait dans le mouvement révolutionnaire mondial. Il y avait un deuxième point pour lequel nous n’avions pas été mandatés et sur lequel nous nous étions prononcés. C’était le problème de l’appartenance de l’Algérie à l’Otan. La France avait intégré le territoire algérien et de ce fait aux territoires couverts par l’Otan. A Pékin, la délégation militaire algérienne, la première à le faire au nom du FLN, de l’ALN et du GPRA, a déclaré que l’Algérie n’était pas concernée par les engagements pris par la France en son nom et qu’il n’était pas question pour l’Algérie indépendante de se retrouver dans une alliance impérialiste qui fournissait à Paris des moyens énormes pour sa guerre colonialiste. Ceci a fortement conforté les Chinois. Après la dénonciation de l’Otan et en fonction de la perception étrangère de la révolution algérienne, nous avions expliqué et fait comprendre aux Chinois ce qu’était réellement la lutte du peuple algérien, et ce, à travers un fait apparemment mineur, mais qui, politiquement, avait un poids certain.
L’Egypte se voulait le leader du monde arabe, elle se voulait l’unificatrice. Elle voulait imposer une unité de ce qu’elle appelait la Nation arabe avec une capitale, Le Caire, un leader, Nasser. A l’époque, la République arabe unie (RAU), qui comprenait la Syrie et l’Egypte, était engagée dans une lutte tous azimuts contre l’impérialisme et ce qu’elle appelait les régimes féodaux arabes.
Abdelkrim Kacem ayant renversé la monarchie hachémite en Irak, l’Egypte espérait son adhésion à la RAU. Mais Abdelkrim, lié, à l’époque, au Parti communiste irakien (PCI), s’y opposait. C’est alors que Nasser avait réagi par une campagne très violente contre le dirigeant irakien. De plus, le soutien qu’apportait le camp socialiste à Abdelkrim Kacem amènera Nasser, du moins pour un certain temps, à l’anticommunisme. Ce qui n’empêchait pas le dirigeant égyptien d’apporter son soutien au mouvement de libération national partout dans le monde et notamment en Afrique. Il était réellement non aligné et menait un jeu de bascule assez difficile entre l’Est et l’Ouest.
C’est pendant cette période de tension entre l’Egypte et l’Irak, que nous nous trouvions à Pékin. Là, Omar Oussedik voulait remercier l’ambassadeur de la RAU qui avait organisé, en l’honneur de notre délégation, une réception pour marquer l’intérêt qu’elle attachait à la révolution algérienne. A l’époque, nous n’avions pas de mission à Pékin représentant l’Algérie révolutionnaire.
Plus tard, nous y ouvrirons une ambassade. C’est Mustapha Ferroukhi qui partira le premier, il mourra en cours de route en Sibérie dans un accident d’avion. Et c’est Kiouane qui ouvrira la première ambassade algérienne dans la capitale chinoise.
Au cours de la réception offerte en notre honneur, le chef de notre délégation a fait une déclaration précisant nos positions politiques sur la situation internationale. Nous avions inscrit notre combat d’émancipation dans le cadre du mouvement révolutionnaire mondial et lancé un appel à ses deux composantes essentielles, le mouvement de libération national et le mouvement communiste mondial d’unifier leurs rangs dans la lutte contre l’impérialisme. Nous avions déclaré que la révolution algérienne a des liens historiques, des liens de civilisation et de culture, des liens de fraternité avec la RAU.
Tout comme nous avions des liens de
compagnonnage dans le combat contre l’impérialisme avec la République populaire de Chine. Enfin, nous avions lancé un appel à nos frères d’Egypte et à nos camarades chinois leur demandant d’unifier leurs rangs, de transcender les divisions pour combattre l’ennemi commun, l’impérialisme, le colonialisme et le néo-colonialisme. Ce langage et cette position ont été vivement appréciés par les Chinois.
D’autant plus qu’on sentait chez eux le désir de renouer avec l’Egypte sur d’autres bases. Le désir d’écarter les questions épineuses qui existaient alors entre le mouvement communiste mondial et le mouvement de libération arabe.
http://www.lesoirdalgerie.com/articles/ ... 968&cid=41
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