Algérie-Maroc: «de la Guerre des mulets à la Guerre des étoiles»
L’espace serait-il le lieu improbable où s’exercent les nouvelles rivalités entre l’Algérie et le Maroc, qui ont lancé, à un mois d’écart, deux nouveaux satellites? Regards croisés sur ce nouvel épisode de Star Wars au Maghreb.
«On est passé de la Guerre des mulets à la Guerre des étoiles», ironise Ayoub Mouzaine, jeune écrivain marocain, dans une déclaration à Sputnik.
Principal poste frontalier entre l'Algérie et le Maroc, «Zouj Bghal» —littéralement «les deux Mulets»-, est depuis longtemps le lieu emblématique de la grande discorde entre les deux voisins. La bonne nouvelle aujourd'hui, c'est que cette symbolique est sur le point de s'étioler. La mauvaise nouvelle, c'est que c'est loin d'être le résultat d'un quelconque apaisement. C'est juste que «Zouj Bghal» a été détrôné au profit d'un nouveau théâtre, l'espace.
Le 10 décembre, l'Algérie a lancé son premier satellite de télécommunications, baptisé Alcomsat-1. La nouvelle prouesse de l'Agence spatiale algérienne (ASAL) a été le résultat d'une collaboration fructueuse avec les Chinois.
Seulement voilà, il se trouve que la mise en orbite du satellite algérien s'est faite 5 semaines après le lancement du satellite marocain, le redoutable Mohamed VI-A, doté de très hautes performances d'observation. De quoi alimenter les spéculations sur cette coïncidence, mais aussi, de quoi faire monter les enchères.
C'est que depuis le 10 décembre, c'est à qui dit mieux. Pour des internautes algériens, le Maroc, n'aurait fait «qu'acheter son satellite comme on achète un AK-47», alors que les ingénieurs algériens, eux, ont contribué au lancement de leur engin spatial. Des Marocains, de leur côté, rétorquent en rabaissant le satellite algérien, qui ne serait «rien d'autre» qu'un satellite de télécommunication, perché à 36.000 kilomètres de la Terre, au même titre qu'un banal Hotbird ou un trivial Nilesat.
Au tour de rapports de presse algériens, alors, de bruisser d'informations faisant état d'un «upgrade» de dernière minute dont aurait bénéficié le satellite algérien pour contrecarrer le Mohammed-VI A, dont on redoute le regard indiscret sur le sol algérien.
Pour Florence Gaillard-Sborowsky, chercheuse à la Fondation pour la recherche stratégique, en charge des questions spatiales, cette dernière hypothèse demeure «peu crédible». Le lancement du satellite marocain ayant été entouré du plus grand secret, les Algériens n'auraient pas pu, à temps, modifier la configuration de leur satellite.