De colossales quantités d'eau se cacheraient-t-elle entre 410 et 660 km sous la Terre ? C'est en tout cas ce que suggère l'analyse d'un petit diamant découvert au Brésil en 2009...
C’est un petit diamant long de 5 mm à peine. Un petit caillou dont la découverte au Brésil suscite aujourd’hui la perplexité de la communauté scientifique. Et pour cause, puisque ce diamant suggère que de colossales quantités d’eau pourraient être profondément enfouies sous nos pieds, dans ce que les géologues appellent la « zone de transition », une région du manteau terrestre située à quelques 410 à 660 km de profondeur.
Ce réservoir d’eau, dont la taille dépasserait celle de tous les océans actuels réunis, ne se présenterait toutefois pas sous la forme d'une masse d'eau liquide, en raison des très grandes profondeurs dont il est question ici. En effet, l'eau située à de telles profondeurs terrestres ne se présente pas sous forme liquide, mais elle est intégrée à l'intérieur des minéraux (lequels sont dit alors "hydratés").
Pour comprendre ce qui amène les scientifiques à émettre une telle hypothèse, publiée le 12 mars 2014 dans la revue Nature
http://www.nature.com/nature/journal/v5 ... 13080.html, il nous faut nous intéresser plus précisément à ce diamant. Mis au jour en 2009 dans le district de Juina, au Brésil, ce diamant a rapidement retenu l’attention du géochimiste canadien Graham Pearson (Université de l'Alberta à Edmonton, Canada) et de son équipe.
Pourquoi un tel intérêt pour ce petit diamant ? Car il s’agit d’un diamant rare. En effet, alors que la plupart des diamants se forment à une profondeur de 150 à 200 km sous la surface de la Terre, ce petit diamant, pesant à peine 0.09 gramme, s’est formé dans une région beaucoup plus profonde du manteau terrestre : la « zone de transition », située entre le manteau terrestre supérieur et le manteau inférieur, soit à une profondeur comprise entre 410 à 660 km. L’analyse de ce diamant est donc l’occasion de mieux comprendre les conditions qui prévalent à de telles profondeurs, une zone très mal connue des scientifiques en raison de sa grande profondeur…
Or, en analysant la nature d’une impureté emprisonnée à l’intérieur de ce petit diamant, Graham Pearson et ses collègues découvrent que cette impureté est en réalité… de la ringwoodite, un minéral dont l’existence était prédite depuis longtemps par les scientifiques, mais qui n’avait pas réellement été mise en évidence concrètement jusqu’ici. De la ringwoodite ? Il s’agit en réalité d’une forme d’olivine (l’olivine est un minéral qui abonde dans le manteau supérieur terrestre), qui s’est formée dans des conditions de pression très supérieures à celles qui entourent la formation de l’olivine. En d’autres termes, la ringwoodite est de l’olivine « formée à haute pression ».
Mais ce n’est pas tout. Car en analysant la composition chimique de ce fragment de ringwoodite, Graham Pearson et ses collègues ont découvert qu’il contenait… 1% d’eau. Si une telle quantité peut sembler faible, tel n’est en réalité pas le cas. En effet, étant donné que les géophysiciens pensent que la ringwoodite abonde dans la zone de transition, alors cela suggère ni plus ni moins que cette région du manteau terrestre pourrait bien regorger d'eau. Selon Graham Pearson, auteur principal de l'étude publiée dans Nature, si l'on se base sur cette proportion de 1 %, alors cela signifie que la zone de transition pourrait même contenir à elle seule plus d’eau que tous les océans du monde réunis.
Toutefois, il n'est bien évidemment pas certain que de telles quantités d'eau se cachent dans cette région du manteau terrestre. En effet, cette estimation n'est basée que sur l'extrapolation d'une proportion d'eau retrouvée dans un unique fragment de minéral. Une proportion dont rien ne dit qu'elle prévaut pour l'ensemble de la zone de transition…
Cette découverte a été publiée le 12 mars 2014 dans la revue Nature, sous le titre « Hydrous mantle transition zone indicated by ringwoodite included within diamond ».