72 Bataljon Komandosa
PRESENTATION :
Comme bien d'autres pays, l'ex-Yougoslavie d'avant 1991 disposait également de forces spéciales et/ou d'opérations spéciales. Cela dit, cette composante de l'arme yougoslave était toutefois limitée quantitativement parlant, du fait même que la politique de défense du pays reposait alors sur le concept de la « défense totale », à l'instar du modèle helvétique en quelque sorte.
Avec le début des conflits qui, pendant plusieurs longues années, allaient enflammer les Balkans, Belgrade prit la décision de mettre sur pied et de développer au sein de l'armée fédérale plusieurs unités en mesure de mener des opérations spéciales. Avec le décret-loi 27-11-2 en date du 12 juin 1992, les autorités de Belgrade décidèrent de créer la 72e brigade d'assaut, nouvelle unité organique de pointe de l'armée de terre, destinée à la conduite d'opérations spéciales et de guerre non conventionnelle.
C'est ainsi qu'avant fin 1992, suivant l'exemple des Etats-Unis, le ministère de la Défense de la moribonde fédération yougoslave mettait également sur pied un commandement chargé de coordonner l'action de ses unités d'élite et de ses forces d'opérations spéciales, regroupant celles-ci au sein d'un corps distinct, dit de forces spéciales. Celui-ci comprenait, pour la précision, la 1ère brigade motorisée de la Garde, la 63e brigade parachutiste et la 72e brigade de forces spéciales. Cette dernière, qui sera rebaptisée 72e brigade spéciale « Faucons », fut chargée plus spécifiquement des actions coup-de-poing lors des grandes confrontations armées contre les forces croates et contre celles bosniaco-musulmanes, des raids de commandos derrière les lignes adverses et d'autres activités propres à la guerre non conventionnelle. C'est de cette façon que les personnels de la 72e brigade spéciale « Faucons » acquirent une solide expérience sur les fronts les plus chauds de Croatie et de Bosnie. Une expérience qui, plus tard sera, exploitée et utilisée à bon escient pour instruire et former de nouveaux spécialistes.
C'est à partir de cette époque que démarra un nouveau processus d'instruction et d'entraînement; processus bien plus ciblé, visant à spécialiser autant que possible le personnel de l'unité. Celui-ci prenait en compte une phase de sélection extrêmement draconienne et une instruction tout aussi poussée, prévoyant l'acquisition de nouvelles techniques et procédures opérationnelles sur la base de l'expérience transmise par les vétérans.
La « recette » donna d'excellents résultats comme le démontrera l'emploi sur le terrain de la 72e brigade spéciale lors des premiers incidents au Kosovo à partir de 1997 et les premiers accrochages entre « Faucons » et militants armés de UCK (Ushtria Clirimtare Kosoves). L'unité fut engagée essentiellement dans les territoires qui étaient passés sous contrôle de la guérilla kosovaro-abenaise, afin de mener des incursions nocturnes contre les bandes armées. Ensuite, durant le conflit de 1999, la brigade fut déployée dans les régions limitrophes de l'Albanie pour bloquer l'offensive de cette même guérilla, soutenue par les raids aériens menés par l'OTAN. Nombreuses furent alors les actions menées par les « Faucons » contre les formations paramilitaires de l'UCK ; actions dans la plupart des cas couronnés de succès grâce à un meilleur entraînement et à un équipement de loin supérieur. Au cours de ces opérations, généralement de très courte durée mais extrêmement violentes, plusieurs dizaines d'éléments de la 72e brigade spéciale furent tués ou blessés, notamment par des tirs de « sniping » et de mortiers.
Pendant ce temps, les forces arm ées serbes étaient soumises à un long processus de réorganisation et de profonde transformation ; processus dans le, cadre duquel les forces spéciales et/ou d'opérations spéciales de Belgrade allaient monter en puissance. Démarré au tout début de l'année 2002, ce processus de transformation est aujourd'hui toujours en cours.
Entre-temps, il a été possible d'optimiser les compétences de ces unités, notamment en constituant des équipes opérationnelles hautement spécialisées dans plusieurs domaines, cela en maintenant toutefois la flexibilité et la versatilité qui caractérisent les meilleures troupes d'élite.
ORGANISATION
Actuellement, la 72e Brigade Spéciale « Faucons » est constituée d'un personnel hautement sélectionné, bien instruit, formé et entraîné, mais également doté de matériels et d'équipements de tout premier ordre, du moins par rapport à bien des unités de l'armée serbe. Ce « plus » permet à la brigade d'être en mesure de conduire un vaste spectre de missions spéciales. Bien que chaque élément opérationnel de l'unité possède une propre spécialité (tireur d'élite, opérateur radio, infirmier, etc.), tout comme chaque unité mineure au niveau du team, les « Faucons » sont répartis pour l'essentiel en trois catégories distinctes: reconnaissance profonde, commandos, opérateurs antiterroristes.
La palette de missions confiées aux deux premières catégories comprend :
- la recherche d'informations sur le terrain et dans tout type d'environnement (montagneux, urbain, etc.), tant en territoire hostile que derrière les lignes ennemies;
- la reconnaissance profonde (missions LRRP) au bénéfice du haut commandement des forces armées serbes ;
- les actions directes, de type commando, et raid de sabotage et destruction, après infiltration à partir des trois dimensions, contre des objectifs de valeur stratégique, tant en territoire adverse qu'en territoire occupé par l'ennemi ;
- la capture et l'exfiltration (ou l'élimination pure et simple) de personnalités importantes constituant une menace pour le pays.
Des missions confiées aux composantes reconnaissance profonde et commando, il est facile de deviner sur quels arguments, disciplines et techniques particulières portent l'instruction et l'entraînement de ces spécialistes : orientation et navigation terrestre, reconnaissance offensive, armement et emploi des explosifs, survie et combat en milieu hostile, dans tous les environnements et dans des conditions climatiques et géographiques extrêmes. Bref, il s'agit là d'un cycle, aussi long qu'ardu et ciblé, propre à toute force spéciale au sens strict du terme.
Quant aux opérateurs antiterroristes, ils sont formés et entraînés à la mise en application de techniques et de procédures spécifiques aux interventions inhérentes à cette spécialité, qui comprend naturellement la libération et l'extraction d'otages. Avec la prochaine entrée de la Serbie dans le programme « Partnership for Peace », le spectre de missions confiées à l'unité sera probablement élargi, notamment pour répondre aux nécessités et exigences particulières de certaines missions et opérations effectuées dans un contexte international, sous l'égide de l'OTAN ou d'autres organisations internationales, comme l'Union européenne par exemple.
Basée à Pancevo, dans les environs immédiats de Belgrade, la 72e brigade spéciale « Faucons » s'articule actuellement et pour l'essentiel sur un état-major, une unité de support logistique (transport, entretien des matériels et des structures, service de santé, etc.), une unité d'instruction et trois bataillons opérationnels : le 1er bataillon antiterroriste, le 2e et le 3e bataillon reconnaissance et commandos. L'unité mineure d'emploi de chaque bataillon est le team, constitué de cinq opérateurs (un team leader et deux binômes).
Comme nous l'avons dit, la 72e brigade spéciale est chargée de la conduite de toute une gamme précise de missions spéciales très diversifiées. Cette diversification des missions assignées nécessite justement, en aval et tout au long de la permanence dans l'unité, un long travail de formation et d'entraînement afin que chaque élément puisse acquérir d'abord les connaissances et techniques requises, et qu'il puisse les maintenir à un même niveau standard.
SELECTION :
Une sélection draconienne
Les volontaires qui désirent intégrer la 72e brigade spéciale doivent satisfaire certains critères : d'abord être engagés volontaires ou militaires professionnels, avoir entre 18 et 27 ans, posséder la citoyenneté serbe, satisfaire un stage de sélection extrêmement draconien, qui dure, en effet, pas moins de trois semaines et comprend, notamment, toute une série de tests physiques, psychophysiques, d'examens médicaux et du comportement. En fait, l'unité recherche avant tout des éléments, certes en parfaite forme physique, qui soient des athlètes complets et résistants, mais aussi et surtout des hommes motivés, stables et équilibrés, capables d'opérer dans les conditions de stress et sous extrême tension, intelligents et dotés d'initiative et de self-control, ayant un sens aigu de la camaraderie et du travail d'équipe ; tout cela dans le but de pouvoir constituer des équipes bien soudées, hautement opérationnelles, en mesure de porter à terme n'importe quel type de mission.
Les volontaires qui réussissent à passer cette sélection sont soumis, ensuite, à un long cycle d'instruction et de formation qui s'étend sur dix à douze mois, en fonction de la spécialité de l'unité à laquelle ils seront assignés. Ce cycle d'instruction et de formation se divise en trois phases : une basique ou individuelle, dite également sélective ; une spécifique à la formation commune (binôme et équipe) ; une, enfin, de synthèse où sont mises en pratique toutes les disciplines et techniques apprises précédemment.
La phase basique/sélective, qui dure trois mois, est dédiée à la remise à niveau de toutes les notions militaires propres au combat d'infanterie (techniques de franchissement, topographie, connaissance des armements et tir sous toutes ses formes, transmissions, combat en localité, parcours du risque, etc.), ainsi qu'à l'enseignement des techniques d'autodéfense à mains nues ou à l'arme blanche et des arts martiaux en général. Cette première phase prévoit également une intense activité physique et psychophysique, avec de longues marches de jour comme de nuit, sur terrain accidenté et avec tout l'équipement de combat.
L'« écrémage » des candidats
Après deux mois de cette préparation ou de « mise en condition » comme disent les instructeurs de la brigade, chaque élément doit être en mesure de parcourir, avec l'équipement, 5 km en moins de vingt-cinq minutes, d'effectuer une marche commando de 12 km avec arme et sac à dos de 10 kg en moins d'une heure et, pour couronner le tout, une de 30 km avec un équipement de 25 kg en un temps record inférieur à quatre heures. Au terme de cette première phase, chaque candidat doit être également capable de parcourir, et cela trois fois par semaine, une distance de 1 600 mètres en un temps maximal de six minutes. Cette intense activité physique permet aux instructeurs d'effectuer un second « écrémage » des candidats volontaires, qui doivent tous posséder le profil indispensable, tant sur le plan physique que psychologique, requis pour être admis au sein des « Faucons ».
Au terme de cette première phase, ceux qui n'ont pas été renvoyés pour inaptitude dans leur unité d'origine sont assignés à l'un des trois bataillons de la 72e brigade, au sein duquel ils reçoivent leurs galons de caporal-chef. Ensuite, en fonction de leurs prédispositions et des notes qui leur ont été attribuées précédemment par les instructeurs, ils suivent un stage spécifique, d'une durée de sept mois pour ceux destinés aux deux bataillons de reconnaissance, commandos, et de neuf mois pour ceux qui ont rejoint le bataillon antiterroriste.
Durant ces longs mois, les instructeurs font de tout et inventent de tout pour renforcer la résistance physique et psychologique de leurs élèves, tout en poursuivant l'instruction et l'entraînement dans les domaines les plus diversifiés: alpinisme et escalade ; stage de parachutisme de trois semaines à Nis, où est basée le 63èle bataillon parachutiste, avec obtention du brevet de base après cinq sauts en ouverture automatique ; stage de survie et de combat en terrain enneigé et en conditions climatiques extrêmes ; techniques d'infiltration et d’exfiltration ; reconnaissance profonde, avec coouverture nstruction de postes d'observation et activité de recueil de renseignements ; planification,organisation et réalisation d'opérations d'actions directes ; perfectionnement aux techniques de tir instinctif, sélectif et de précision ; procédures spécifiques d'intervention pour la capture et/ou la neutralisation d'individus, la libération et extraction d'otages ; combat rapproché et au corps à corps, etc. Durant toute cette phase conclusive de la formation, chaque homme tire des milliers de cartouches avec les différentes armes en dotation à l'unité, tout en ayant l'opportunité d'utiliser différents types d'explosifs et de détonateurs pour parfaire ses connaissances en matière de sabotage et de destruction.